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Sihane.a
20 septembre 2012

Il était une fois...LE PAGNE IVOIRIEN!

J'aurais voulu vous faire un bref historique de l'apparition du pagne dans le monde mais je n'avais franchement pas les mots. Par ailleurs, je suis tombée sur un article rédigé par Mr Raoul Germain Blé et publié sur le site http://communication.revues.org/index.html qui m'a vraiment plus. cet article résume en mieux, tout ce que j'aurais pu dire sur les origines du pagne et la présentation des differents types de pagne. Je fais donc ma paresseuse en bon ancien élève d'université. Par contre je ne ferais pas un copié collé du contenu. Je vous mettrai juste les informations que j'estime être intéressantes. J'espère que vous apprécierez!

 

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En Afrique noire, le pagne s'affiche partout avec ses couleurs vives. La variété des motifs et l'éclat des couleurs, les techniques d'impression et de teinture en ont fait un art textile riche de significations. Ce que nous disons là ne date pas d'aujourd'hui à en croire Jacques Anquetil. Ce sont dans les tombeaux dogons, creusés dans les falaises de Bandiagara que les archéologues français et hollandais ont découvert les plus anciens fragments de tissus africains, datés entre le xie et le xviiie siècle, unis ou teints en indigo ou composés de bandes cousues formant un damier blanc et indigo foncé, presque noir, correspondant au même tissu que celui utilisé encore aujourd'hui comme couverture-linceul pour envelopper les morts. Il s'agit bien là d'une culture textile africaine authentique, se manifestant bien avant l'arrivée des étrangers (1990 : 277-278).

 

Le pagne, un moyen de communication en Côte d'Ivoire

 

La préoccupation de l'auteur a porté sur les messages que révèlent les noms des pagnes. Les différents noms qu'on leur attribue sont le fruit de l'imagination des vendeuses ou de leur clientèle. Confectionné en vêtement, le pagne WAX jouit d'une considération sociale, car il devient, pour toute personne qui en est vêtue, un moyen de reconnaissance et d'affirmation de soi.

Cette étude de Mr Raoul Germain Blé couvre le district d'Abidjan. Abidjan est une communauté urbaine composée de dix communes et de trois sous-préfectures, pour une population estimée à cinq millions d'habitants. Mr Blé s'est concentré pour l'essentiel sur la commune d'Adjamé et sur celle du Plateau. La première constitue un pôle commercial dont le marché principal (appelé communément le grand marché d'Adjamé) regorge de vendeurs de pagnes. Ici, en grande partie, ce sont les femmes dioulas originaires du nord de la Côte d'Ivoire qui sont des commerçantes avisées, car dans leur culture, ce métier se transmet de mère en fille. Certaines achètent directement les pagnes au magasin Uniwax du Plateau alors que d'autres les acquièrent chez les grossistes d'Adjamé pour aller les revendre à l'intérieur du marché. Les vendeuses « ambulantes » viennent quant à elles se ravitailler chez les premières pour aller commercialiser les pagnes dans les quartiers populaires. Il s'agit là d'un commerce de proximité où ces dames se promènent pour proposer leurs marchandises. Dans le quartier administratif du Plateau se trouve la rue du commerce où se concentrent les grands fournisseurs de la sous-région et qui abrite un nombre important de magasins offrant une variété de pagnes, une diversité de prix et même « l'embarras » du choix.

L'étude comporte quatre sections : la première s'intéresse à l'émergence du pagne wax, la deuxième expose l'objet de recherche et le corpus, puis Mr Blé résume ses premiers résultats dont il discute en guise de conclusion.

Cette étude exploratoire ne prétend nullement épuiser toute la problématique du pagne wax. Elle en constitue seulement une approche que d'autres universitaires africains pourront parfaire ou enrichir de leurs contributions.

 

Le pagne au rythme du temps

Au xie siècle, le tissage des bandes de coton écru existe déjà dans la région du haut Sénégal, en pays toucouleur. Au fur et à mesure que l'islam pénètre en terre africaine, celle-ci se laisse séduire par les étoffes étrangères, important ainsi de grandes quantités en échange de son or et de ses esclaves. L'étoffe tissée en coton est à cette époque une parure de prestige et est réservée aux notables et aux souverains.

À partir du xiiie siècle, les rois du Mali se convertissent à l'islam. Ces premiers États musulmans seront des lieux d'échange entre le monde arabe et l'Afrique. Les textiles acheminés par caravanes depuis les rivages méditerranéens relient alors le Soudan occidental au monde des tissus de facture européenne et arabe. Selon Jocelyne Étienne Nugue et Elisabeth Laget,

[...] les récits des voyageurs des xve et xvie siècles mentionnent, par exemple la ville de Kong (située au nord de la Côte d'Ivoire qui est la ville historique des Senoufo depuis le xie siècle) comme un grand centre de tissage et de teinture (1985 : 34).

Étant donné que ces étoffes étrangères n'étaient pas accessibles aux personnes à faible revenu, le tissage du coton devient alors la solution trouvée à l'échelle locale pour confectionner des habits à des prix accessibles. À en croire Anquetil,

à cette époque, même si cette activité est encore balbutiante, elle se développe largement, fruit d'un commerce florissant. Les cotonnades fabriquées à Kong étaient vendues par les commerçants Mandés et Ahoussa jusqu'à Djénné au Mali (1990 : 23).

Mr Blé limite son travail aux pagnes kita, sénoufo et baoulé. Ces trois pagnes participent de la construction de l'histoire culturelle et religieuse des populations ivoiriennes, pérennisant ainsi les traditions. Par exemple, dans la région de Tiébissou dans le centre du pays, des ateliers d'apprentissage forment des jeunes au métier du tissage et à la connaissance des motifs géométriques et des couleurs ainsi qu'au rituel du pagne traditionnel dont les enjeux économiques ne sont pas négligeables.

 

Le pagne

 

Le pagne, mot utilisé tant de fois en Afrique de l'Ouest francophone dans le langage quotidien, en famille, au travail, dans les lieux de culte, dans les différents espaces publics, désigne un morceau de tissu de forme rectangulaire. Étymologiquement, ce vocable dérive du mot espagnol paño, qui signifie « pan d'étoffe », c'est-à-dire morceau d'un vêtement. Aussi, en latin, pannusse traduit par « morceau d'étoffe ». Ce bout de tissu soit en écorce battue, soit en fibres tissées de raphia, soit encore en coton ou de matière végétale tressée, était utilisé dans le temps jadis comme vêtement noué autour de la taille. Aujourd'hui, le pagne désigne toujours une pièce de tissu rectangulaire, disponible en version industrielle et dans une extraordinaire variété de dessins et de couleurs. Les stylistes, les modélistes, les couturiers continuent à en faire une parure de beauté et de richesse. Cette étoffe est encore associée, dans les secrets de ses tissages et de ses méthodes d'impression, à des mythologies qui lui confèrent une origine divine.  En effet, comme le soulignent Claude Fauque et Otto Wollenweber, « chez les Dogon du Mali, par exemple, le même mot sert à dire parole et tissu. [...] Le mouvement du métier, le bruit de la poulie, le rythme de la navette, les chants du tisserand lors du travail même, sont le verbe du tissu » (1991 : 37). Et Anquetil d'ajouter que « le métier dogon devient ainsi un lieu sacré qui relie le tisserand directement à son dieu par la parole insérée dans le tissu qu'il tisse, trame après trame [...] » (1990 : 29).

En Côte d'Ivoire, les tisserands de l'ethnie baoulé, avant d'entreprendre leur activité de tissage, évoquent le nom de « gnamien » (dieu) qui, dans leur langue, fait de chaque artisan un initié. Cette présence d'un dieu est également convoquée chez les Sénoufo, au nord de la Côte d'Ivoire, où les pagnes peints aux motifs bruns ou noirs, portés par les danseurs initiés au poro, un culte qui régit encore aujourd'hui leur organisation sociale et religieuse, représentent un pouvoir protecteur magique et une fonction rituelle.

Le pagne africain serait d'origine divine que conforte la Bible : « [...] c'est toi [...] qui m'a tissé dans le ventre de ma mère [...] » (psaume 139). Cette image présente le Dieu des chrétiens comme un « tisserand », car c'est en tissant qu'il façonne l'homme et la femme. Il leur donne une forme et il les habille de liberté pour qu'ensemble, ils tissent la vie, créant ainsi le « tissu social ». On comprend alors que le pagne fabriqué de maintes matières garde toujours son univers mythologique qui fonde son histoire dans les zones rurales, c'est-à-dire « le vrai pays », au sens de Thomas Sankara (1983-1987).

 

Le pagne kita ou kenté

 

Le tissu, appelé kenté chez les Ashanti du Ghana et kita chez les Ewe du Togo et du Bénin ou chez les Akans de la Côte d'Ivoire, est un genre de tissage très répandu en Afrique de l'Ouest. Confectionné à partir de bandes tissées et assemblées, formant une étoffe aux dessins géométriques et aux couleurs éclatantes et lumineuses, le kita est particulier du fait que ses motifs sont tissés dans la trame. À en croire Terre d'Afrique,

[...] porter le kita est tout un art : les motifs doivent apparaître parfaitement ordonnés, le bord du tissu régulièrement agencé. Traditionnellement, les hommes le portent comme une toge, avec un plissé très élaboré, le pan gauche rabattu devant la poitrine. Les femmes peuvent se couvrir du kita de cette manière, mais aussi le draper autour du cou, ou en dessous des bras, laissant les épaules découvertes (2001 : 8).

Aujourd'hui, on utilise cette technique de tissage pour confectionner des chemises, blouses, robes, chapeaux, sacs à main, etc.

 

Le pagne sénoufo

 

Les pagnes sénoufos de la Côte d'Ivoire sont décorés de nombreux animaux mythologiques ou totémiques comme le crocodile, le serpent, la tortue, le caméléon selon des motifs géométriques. Selon Anquetil, ces dessins d'animaux sacrés « avaient le pouvoir de protéger et de procurer une bonne chasse aux chasseurs qui portaient cette tunique » (1990 : 292). Ils sont peints en noir directement sur le tissu de coton écru à l'aide d'un couteau en bois légèrement recourbé et taillé à l'extrémité. Ces tissus de coton filé, épais et irrégulier, en bandes de 10 à 14 cm, cousues en patchwork sont encore dans le nord de la Côte d'Ivoire la base des costumes des paysans, des chasseurs et des danseurs. Ils constituent l'expression d'un art populaire riche de traditions.

 

Le pagne baoulé

 

Les artisans baoulés, héritiers du royaume ashanti, avaient depuis des siècles la réputation d'artisans habiles et ingénieux dans l'art de confectionner des pagnes qu'on mixait aux teintures de l'indigo et de la noix de cola pour en faire ressortir un éclat brun roux. Ces étoffes, drapées sur une épaule, sont tissées avec des fils de chaîne teints à l'indigo. Chaque motif a un nom particulier et des symboles baoulés possédant une signification intrinsèque. Ces pagnes sont utilisés encore pour l'habillement, la parure, le costume de travail et de cérémonie.

 

Le pagne wax

 

Le marché ivoirien offre une variété de pagnes wax. Les femmes, d'un rapide coup d'œil, savent reconnaître les différentes qualités de pagnes : c'est du wax hollandais, c'est du Vlisco, etc. Les variétés de pagnes ne se limitent pas seulement aux couleurs et aux motifs, mais aussi à la qualité de l'impression.

Le wax emprunte au batik ses motifs et couleurs, mais est fabriqué de manière industrielle, tandis que le fancy, façonné par impression directe, est apparu sur le marché africain plusieurs années après le wax. Il est moins résistant et également de moindre qualité, mais son prix est plus abordable pour les familles démunies.

Les pagnes anciens, qu'ils soient baoulé, kita, sénoufo ou les plus traditionnels gouro et yacouba, continuent à habiller les hommes et les femmes de la société ivoirienne dans les moments de joie, de malheur ou de deuil. Certes, les pagnes imprimés industriels envahissent le marché textile, mais les pagnes artisanaux ne cessent d'être des parures de grande valeur sociale, présents dans toutes les cérémonies traditionnelles.

Le pagne wax recèle toujours un message fort, destiné à la société tout entière. Dès lors, quelques questions se posent : les différents noms des pagnes sont-ils des moyens de communication ? Quel thème communiquent-ils ? Qui leur confère ce rôle de communication ?

Le pagne wax confectionné est plus qu'un vêtement, car il devient, par l'intermédiaire du nom qu'il porte, un moyen de communication. Son message prend sa source dans les crises, les mutations sociales, les souffrances, les joies, etc., c'est-à-dire qu'il « ramasse » toute la vie affective et sociale dans une information toujours actuelle.

En effet, on peut suivre, jour après jour, le déroulement de l'actualité, revu et « corrigé » par le regard des femmes avec une totale liberté d'expression dans le tissage du pagne. Le pagne wax, devenu aujourd'hui un produit industriel, nous invite à parcourir sa traçabilité sociale, politique, affective, apprivoisée par la magie des différents noms qui lui sont associés.

L'objectif de Mr Blé est de proposer une lecture des noms des pagnes wax en évoquant les contextes qui leur ont donné naissance. nous en parlerons dans d'autres articles. On peut chercher cette clé soit dans la structure et la dynamique des réalités sociales quotidiennes, soit dans le fait culturel ivoirien. Le médium « pagne wax » relaie des images, des couleurs et parfois même des textes. C'est donc un échange de signes et de symboles au sens que Pierre Babin donne au message : « [...] le rayonnement d'une personne produisant des effets sur le récepteur » (1991 : 35). Dans ce travail, nous considérons les noms attribués aux différents pagnes comme autant d'éléments de connaissance porteurs de conventions et de codes à l'adresse d'un public.

Peu de publications s'intéressent aux noms que portent des pagnes wax et aux messages qu'ils renferment. Toutefois, l'ouvrage de Fauque et Wollenweber ouvre quelques pistes intéressantes lorsqu'ils écrivent que « les pagnes se présentent comme une bibliothèque » (1991 : 127). Pour sa part, Michèle Coquet (1993) nous fournit un cadre historique quand elle décrit la diversité des coutumes vestimentaires en Afrique au sud du Sahara et tout particulièrement quand elle retrace les différentes formes d'ornementation du corps et les nombreuses parures en usage à partir du xie siècle. Anquetil (1990) complète cette fresque en relatant l'évolution du tissage et de l'imprimerie à travers les diverses civilisations textiles qu'il a étudiées. Pour sa part, Claudine Vidal (1991 : 122) nous plonge dans une société africaine contrastée et nous aide à comprendre « les crises d'une ville en expansion continue, d'un milieu social en profonde transformation », comme c'est le cas des cités urbaines de la Côte d'Ivoire.

 

etoffe-wax

 

 

 

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